La démocratie n’existe pas. Elle reste à inventer.

Libres et égaux en voix. Julia Cagé Fayard

Après un brillant essai ” Le prix de la démocratie” Fayard 2019, sur le financement de la démocratie,Julia Cagé nous livre son analyse sur ce que certain appelle la crise de la démocratie. Elle ne se contente pas seulement de cette étude mais formule un certain nombre de propositions qu’elle qualifie de radicales.

Cette analyse s’appuyant sur de nombreux travaux et études universitaires, Julia Cagé montre que loin d’être en bout de course la démocratie à besoin d’être approfondie, renforcée, exercée et non simplement déléguée à nos représentants ou incarnée tous les 5 ans, trop souvent par un homme, soit disant “providentiel”. C’est aussi une lecture précise de cette crise de la représentation qui montre que les structures de décision ne sont composées que des mêmes personnes ou au moins du même profil, l’homme blanc de plus de 50 ans CSP++. L’Assemblée Nationale ne compte que 3% d’ouvriers et d’employés.

Pour cela elle montre aussi les limites et les insuffisances du tirage au sort et lui préfère l’exigence de diversité de la représentation. Cette diversité permet l’émergence de l’intelligence collective. C’est la qualité de la délibération qui se trouve au centre de ses propositions. La démocratie c’est le débat dans la diversité, c’est le choix du représentant qui sera le plus à même de défendre un projet, une idée. Le tirage au sort supprime cette partie du choix des candidats par les citoyens. Ce choix doit se faire après rencontre avec tous les candidats qui présentent leur projet, montre leur capacité à débattre, à écouter, à rendre compte …

Elle développe le concept de “démocratie délibérative” qui fait l’éloge du “consensus par recoupement” une décision n’est légitime en démocratie que si elle se fonde sur un débat préalable auquel participent les citoyens. Pour cela ils doivent être confronté à des points de vue opposés. Ce n’est pas obtenir un consensus, mais prendre en compte la nature conflictuelle de la politique.

Elle formule aussi de nombreuses propositions pour remettre le citoyen à l’origine des décisions qui le touchent. Le référendum délibératif, qui allie une information complète est une délibération exigeante et pluraliste. Elle propose la mise en place de référendum législatif et abrogatif d’initiative populaire pour cela il doit être porté par 1 ou 2 % du corps électoral pour la mise en place de cette consultation nationale et obtenir un taux de participation supérieur à 50 % exigé pour valider ce projet.

Elle est en appel à reconquérir la démocratie, elle développe certains points de notre vie politique, le fonctionnement des parties, leur financement, le choix des candidats au travers de primaires délibératives.

Elle critique durement une philanthropie à la française et insiste sur le fait que si toutes ces entreprises payaient leurs impôts, le budget de la nation pourrait prendre en charge tous les services publics nécessaires pour tous. Plutôt que tous ces dons qui donnent droit à réduction d’impôt elle propose la mise en place de bons délivrés par les citoyens pour le financement des partis politiques, des médias et des associations. Chaque année l’État consacre 2,4 milliards d’euros au dons des particuliers et au mécénat des entreprises. Elle évoque aussi la question des budgets participatifs qui doivent être suffisant pour ne pas être une illusion de la démocratisation. Pour elles la politique c’est la liberté or la liberté n’existe que dans son exercice politique concret. Le dernier chapitre est consacré aux médias qui doivent à la fois regagner la confiance de leurs lecteurs et se réorganiser sous forme de fondation pour garantir un modèle économique qui protège leur indépendance et leur financement.

En conclusion citant Hannah Arendt “Contrairement à la force ou à la puissance, le pouvoir ne diminue pas lorsqu’il est partagé. Bien au contraire, il augmente.” Son approche de la notion et de la nécessité de diversité nécessite un approfondissement pour bien comprendre si ce besoin de diversité n’est pas la mise en place ou le risque de communautés d’intérêts différents. Elle utilise le mot d’intersectionalité qui mérite bien des éclaircissements. Je recommande évidemment la lecture de ce livre qui nous montre que la démocratie est loin d’être en crise. Elle est bien vivante, Elle doit être plus présente dans la vie de tous les citoyens.

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